Kinshasa : la première ville africaine qui flotte !

Article : Kinshasa : la première ville africaine qui flotte !
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25 décembre 2022

Kinshasa : la première ville africaine qui flotte !

Kinshasa, capitale de la République Démocratique du Congo, a connu une fin d’année 2022 dramatique et inoubliable. Les pluies diluviennes de la nuit du 13 décembre ont fait vivre aux Kinois les plus affreuses inondations jamais enregistrées, causant morts d’hommes, dégâts matériels inimaginables, destructions de plusieurs chaussées et routes de dessertes agricoles.

Un bilan lourd qui fait froid au dos : 130 personnes ont perdues la vie, par noyade, électrocution, des ménages détruits, plusieurs quartiers de la ville complètement immergés et la route nationale n°1 coupée en deux, rendant ainsi le passage impossible. Comment une ville plus vaste que Paris, Seychelles et cape vert réunis, puisse être immergée dans les eaux ?

L’insalubrité dans la ville de Kinshasa : un problème de santé publique

À Kinshasa, l’insalubrité est similaire au syndrome de Stockholm, plus répandue que la COVID-19, incurable comme le SIDA, la ville est un dépotoir à ciel ouvert et les pluies diluviennes nous l’ont fait comprendre ! Sous l’emprise de la marque de la bête, à l’instar de 666, le fléau Insalubrité touche toute la population : aucun Kinois ne peut manger, ni vendre, ni acheter, sans avoir jeté les immondices dans les caniveaux, sur le sol, dans les installations d’utilité publique.

La ville miroir du pays connaît une insalubrité sans précédent, dans toutes ses 24 communes, et cela, depuis des lustres. Immondices par-ci, déchets solides par-là, cette mégapole autrefois appelée « Kin la belle », a perdu sa belle robe au point de devenir la poubelle du monde.

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Kinshasa produit plus de 10.000 tonnes de déchets par jour et compte 24 communes et aujourd’hui on en trouve plus une qu’on dirait qui respecte les normes d’hygiène. Même à Gombe, la commune institutionnelle, considérée comme la vitrine l’on retrouve des poubelles qui jonchent les avenues dans certains coins.

Crédit photo : Wikimedia commons, photographe : Joe Kyabby

Avec le temps, les caniveaux, les rivières et les avenues ont été transformés en poubelles géantes où tout le monde jette toute sorte d’ordures sans être inquiété. Cependant, si pour les uns c’est par manque de poubelle, pour d’autres c’est une question d’habitude. Avec un système de gestion de déchets quasi inexistant, ces plastiques qui stagnent à l’entrée des caniveaux rendent difficile la circulation des différentes eaux, provoquant des graves inondations après des grandes pluies, faisant ainsi de Kinshasa une ville flottante.

Si aujourd’hui, plusieurs Kinois souffrent de la typhoïde et en meurent, c’est en partie suite à ces égouts bouchés, aux eaux stagnantes des inondations dégageant des odeurs nauséabondes, des bouteilles en plastiques, des sacs en plastiques flottant sur les rivières produisant davantage des moustiques responsables de la malaria, des grenouilles ainsi que d’autres sortes d’insectes, participant à la dégradation écologique de l’environnement, mettant ainsi en péril la santé et des enfants et des adultes.

Crédit photo : photographe des rues de Kinshasa

En RDC, le seul recensement général de la population et de l’habitat a été réalisé en 1984. En l’absence d’un autre recensement pour disposer des données sur la population, les estimations de l’annuaire statistique en 2021 donnent un chiffre 15 millions d’habitants pour la ville de Kinshasa, croissance due à des migrations internes et au recul des limites de la ville.

Avec ces chiffres, mettre en place un système de gestion des déchets est très important, car plus la population s’accroît, plus nous devrions nous attendre à un taux d’immondices plus élevés, et plus cette négligence sera à jour, la population payera davantage le prix fort. Il faudrait et au gouvernement et à la population de comprendre qu’avoir un système de gestion des différents déchets sauverait des vies, diminuerait le taux des certaines maladies, préviendrait des inondations.

L’échec du projet kin-bopeto (Kin propre)

Le gouverneur de la ville de Kinshasa Gentiny Ngobila, avait lancé le projet Kin-bopeto, visant à assainir la ville. A travers ce programme, le gouverneur a fait installer des poubelles publiques afin de permettre à la population d’y jeter tout déchet avec un service de cantonage. Mais ces poubelles ne sont installées que sur les artères principales, alors que dans la cité ce programme est méconnu. Le problème est que ces poubelles, s’évacuent difficilement, une fois pleine, le même problème revient. Même dans sa recherche des solutions pour pallier à ce problème d’insalubrité qui gangrène Kinshasa, le gouverneur faille. Aucune structure n’avait été mise en place pour évacuer les poubelles une fois débordées.

Crédit photo : Maria Maba

Chaque mois, le gouvernement décaisse 2 millions de dollars pour assurer la fonctionnalité du projet Kin-bopeto, mais le constat est amer car jusqu’à présent plusieurs quartiers de la ville n’ont pas de caniveaux et pour ceux qui en ont, ils restent bouchés, des régies d’assainissement inexistante et inopérante à travers la ville. Et l’opinion se pose une seule question : où va tout cet argent ?

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Le projet a également souffert de manque de campagne de sensibilisation, de mobilisation, les communes reculées de Kinshasa comme Kinseso, Makala, Bumbu, Selembao, Maluku, N’sele, Kimbanseke etc n’ont pas bénéficiées de ce projet, on dirait qu’il était juste créé pour le centre-ville et ses communes environnantes.

Après échec du projet kin-bopeto, un autre projet voit le jour. Le projet Kintoko diminutif de Kinshasa kitoko (Kinshasa la belle) de la société Ok plast, société spécialisée dans la production des produits plastiques en partenariat avec le gouvernorat de la ville de Kinshasa. Un projet visant à récupérer, recycler et réutiliser ces bouteilles en plastique qui constituent une matière première et qui seront transformées en usine en des nouvelles bouteilles. La logique de ce projet est qu’à partir d’un certain nombre de bouteilles, l’individu qui amène ce lot reçoive une paie dont 1kg est acheté à 100fc. Mais malgré les efforts fournis, ce projet est tout sauf une réussite car le taux des plastiques à travers la ville ne cesse de grimper et la ville est de plus en plus sale.

L’ingéniosité congolaise

Certaines initiatives privées avaient été prises par des organisations de protection de l’environnement et par des personnes sans pour autant venir à bout de ce phénomène de pollution.

Nous citons par exemple le cas de Nicole Menemene, jeune congolaise habitant dans la ville de Bukavu dans la province du Sud-kivu qui a crée son entreprise se spécialisant dans le recyclage et la valorisation de déchets plastiques. Elle avec son équipe transforme une fois recyclées ces ordures en tableaux artistiques, fauteuils, étagères, paniers etc et espère un de ces jours l’accompagnement du gouvernement.

Nicole Menemene sur son lieu de travail, où elle recycle en transformant les bouteilles plastique en plusieurs objets
Crédit photo : Marie-Jeanne
Des bouteilles recyclées et réutilisées en forme de panier.
Crédit photo : Maria Maba

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Ce qu’il faut faire en plus

Toutes ces initiatives citées ci-haut n’étaient pas en soit mauvaises, elles ont terriblement subit un grave problème de communication ; la population qui est un acteur majeur de cette lutte a été mise à l’écart, elle qui doit jouer un rôle très important car au finish, c’est elle qui peine. Initier des campagnes, des conférences, des colloques, faire des sensibilisations de porte à porte s’il le faut à fin d’expliquer à la population comment notre environnement se détruit petit à petit avec la négligence de la gestion des déchets ; que prendre cette situation avec beaucoup de considération nous épargnerait de tant de calamités.

Cependant, pousser la population à reprendre les travaux d’assainissement autres fois en vogue à Kinshasa chaque week-end où tout le monde était sensé faire la propreté devant chez soi sous peine d’amande en cas de négligence serait souhaitable. Faire le tri des objets en curant les caniveaux, c’est-à-dire mettre du sable de côté, ensuite les bouteilles en plastique, qui pourront être vendues à Kintoko.

Mais aussi, pour des poubelles déjà mises en place, créer une sous structure qui tacherait de les remplacer chaque weekend et les évacuer. Et aussi étendre ces poubelles publiques jusqu’à la cité et avoir un service de suivi.

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