Avoir 30 ans à Kinshasa…

Article : Avoir 30 ans à Kinshasa…
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28 juillet 2023

Avoir 30 ans à Kinshasa…

Sous d’autres cieux, à 30 ans, homme ou femme, les gens sont accomplis. Ils ont un boulot stable, une relation sérieuse ou sont même mariés, entretiennent leurs foyers, ils ont des enfants et tout va pour le mieux. Mais la réalité est toute autre à Kinshasa, à tel point qu’on considère ‘’30 ans’’ comme l’âge de toutes les pressions.

Crédit photo : Photographe des rues de Kinshasa

A 30 ans, on est obligé de cocher la case « de 30 à 45 ans », ça fait vieux non ? A la vingtaine, on se considérait jeune, mais une fois la trentaine atteinte, l’on se sent vieux et on s’abstient de beaucoup de choses, l’on devient responsable, on ne donne même plus son âge aux gens, bref une période de la vie vécue différemment par diverses personnes. Avoir 30 ans à Kinshasa signifie beaucoup, la personne qui atteint cet âge est vue autrement dans la société, mais, voulant être épanouie, émancipée, indépendante financièrement, elle ne sait pas par où commencer parce qu’elle est confrontée à plusieurs réalités qui retiennent sa vie en arrière. Dans cet article, je vous explique comment les kinois vivent cette période si marquante de la vie.

Crédit photo: Pexels, photographe : Prath snap

A 30 ans, on est supposés avoir quitté le toit parental

A 30 ans, on considère une personne accomplie sur le plan scolaire et académique, elle doit normalement avoir un travail qui lui permette de s’organiser et quitter le toit parental. Mais le constat est amer lorsqu’on observe le nombre des diplômés que les universités kinoises déversent chaque année sur le marché de l’emploi, le nombre de ceux qui obtiennent des postes dans les entreprises et ceux qui finalement se lancent dans l’entrepreneuriat. On comprend tout de suite que les choses ne sont pas aussi faciles que ce que l’on pense. Peu importe leurs efforts, le supplice du chômage les rattrape quand même et retarde leur vie de plusieurs années, ce qui fait qu’ils vivent encore plus longtemps sous le toit parental indépendamment de leur volonté. Une situation qui devient très gênante, car plus les enfants grandissent, plus les rôles s’inversent. Hier enfants, aujourd’hui ils sont supposés avoir la responsabilité de prendre soin des parents, d’aider les petits, mais dommage, parce que bien que l’âge avance, ces personnes restent encore une lourde charge pour leurs parents.

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A 30 ans, on est supposés avoir un travail stable

Les jeunes sont confrontés au problème de chômage, qui est expliqué par le manque d’entreprises mais surtout par l’exigence de l’expérience aux nouveaux diplômés qui n’ont jamais fait même les stages professionnels. Et pour ceux qui travaillent quand même, si on peut le dire comme ça, ils sont très mal payés.

Crédit photo : Pexels, photographe : Seun Adeniyi

Pour cause, Kinshasa est inondé par les indo-pakistanais, chinois, libanais, qui créent leur magasins et embauchent les kinois en leur réservant un salaire de misère ne pouvant même pas subvenir à la moitié de leurs besoins. Alors qu’actuellement avec la dépréciation du franc congolais, 1 $ vaut 2.550 fc, les indo-pakistanais paient avec l’ancien taux où 1$ valait 1.400 fc. Une situation très compliquée pour beaucoup de Kinois qui veulent s’épanouir : si tout reste ainsi, rien ne changera, on aura beau atteint 30 ans voir même plus, ça ne restera que des chiffres.

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A 30 ans, on est supposées être mariée et tenir un foyer stable

A Kinshasa, il y a une citation célèbre en lingala qui dit « mobali azalaka na âge te », qui veut dire littéralement que « l’homme n’a pas d’âge ». Cette citation met la femme sur un chrono, lui rappelant sans cesse qu’elle n’a pas de temps, ça grouille, il faut se marier. Parce que l’homme, lui, peut épouser une femme de 25 ans en ayant 60 ans, tandis que l’inverse n’est pas faisable pour la femme. Mais comment organiser un mariage quand on n’a pas de boulot stable avec un revenu mensuel considérable ? Les femmes se posent cette question et finissent par se demander si un jour leur compagnon les honoreront. A Kinshasa, une femme qui atteint la trentaine sans un mari ou pire, sans même un engagement prometteur, est très mal vue. Elle est considérée comme quelqu’un qui a mal conduit sa vie ou simplement quelqu’un de malchanceux. Or plus les hommes sont au chômage, moins il y aura de mariages…

crédit photo : Pexels, photographe : Bashir Olawoyin

Kinshasa est une ville où les gens sont très conservateurs : le mariage est ultra sacré. Il ne faut même pas envisager aller habiter avec un homme sans s’être mariée. Si cela reste acceptable dans les cas de grossesse avant le mariage, dans les autres cas, ça ne vient même pas à l’esprit. Il faut donc patienter jusqu’à ce que le mariage arrive parce que au-delà de tout il faut honorer les parents.

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Cependant, n’allons pas dire que toute la jeunesse kinoise est au chômage et que les gens ne se marient pas, non ! Tous les week-ends, en défilant sur les réseaux sociaux, nous ne ratons pas de voir les photos des demandes en mariage et même des couples mariés. Beaucoup des jeunes aujourd’hui se sont lancés dans l’entrepreneuriat, un moyen pour eux d’échapper au manque d’activité. En faisant quelques années d’économie intense, l’homme finit par épouser sa bien-aimée, qui a longtemps attendu. C’est dire que « la patience paie » !

Ce que les familles doivent comprendre une fois de plus

Les familles kinoises devraient comprendre cette jeunesse qui fait face à plusieurs réalités, beaucoup de familles comparent leurs enfants à ceux d’autres familles, oubliant que sur cette terre, chacun a son heure de bénédiction. On ne sera pas tous bénis le même jour à la même heure, chacun a sa trajectoire et il faut juste avoir de la patience et se battre comme on peut.

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Par ailleurs, l’âge, n’est pas synonyme de responsabilité, il y a ceux qui gagnent tôt leur vie et se maintiennent et il y a aussi ceux qui gagnent tard leur vie, tout dépend de la conjoncture du pays dans lequel l’on se trouve et des opportunités qui se présentent devant soi.

Mais au-delà de tout, atteindre 30 ans pèse quand même sur les épaules… Mort de rire

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